- PREVOIR
LE TEMPS COMME LES MARINS
Quoi
de plus simple, direz-vous, que d’écouter les bulletins météorologiques
à la radio, ou mieux encore, puisque vous êtes dans la région
concarnoise, d’appeler le répondeur automatique de la station
de Bénodet ?
- Vous faites
confiance aux spécialistes et à leurs instruments : vous
avez sans doute raison, mais en vacances on peut aussi, et parfois
avec autant d’efficacité, faire appel à d’autres procédés moins
officiels.
- Voici
une méthode, à la portée de tous, que proposait
à ses lecteurs le journal « Le Finistère »… il
y a cent ans :
-
- Lorsqu’on
vous sert votre café et que vous avez ajouté du sucre, attendez
de remuer avec votre cuillère : si la mousse se forme au
centre de la tasse pour se diriger lentement de tous les coté
vers le bord : signe de beau temps. Au contraire, si la mousse
se présente au centre mais divisée en petites bulles séparées
qui gagnent vite les bords de la tasse : Signe de pluie.
Le temps sera variable si les bulles se dirigent rapidement d’un
seul coté de la tasse.
-
Mais
peut-être préférez-vous connaître quelques uns des secrets que
se transmettaient de père en fils les pêcheurs, au temps des chaloupes
à voiles. A la merci du vent et des intempéries ils devaient
rechercher tous indices susceptibles de les renseigner sur les
caprices du ciel : leur pêche, mais aussi bien souvent leur
vie, en dépendait.
- Avant même
d’avoir franchi les portes de la Ville Close et rien qu’en regardant
le sol, un matelots avait si le temps allait vers le beau ou l’orage: « Le
pavé détourne aujourd’hui : avant ce soir c’est la pluie ».
Cette curieuse expression signifiait que les pavés de la rue avaient
un aspect moite qui laissait présager un temps humide.
- Les oiseaux
de mers étaient aussi d’une aide précieuse :
- Si, haut
dans le ciel, des bandes de mouettes rallient la terre en criant,
le mauvais temps n’est pas loin. De même, si à bord du bateau
vient se réfugier l’un de ces petits oiseaux de mer surnommés
« capitaines au long court », mieux vaut affaler les
voiles avant que n’arrive le coup de vent. Par contre des vols
de mouettes regagnant lentement le large par petits groupes, au
coucher du soleil sont un présage de beau temps pour le lendemain.
Voir
nettement les îles Glénan, situées au large de Concarneau, n’est
guère bon signe pour les jours à venir, pas plus que le fait d’apercevoir
en double le reflet d’un phare dans l’eau, phénomène qui annonce
un fort coup de vent.
- Un pilote
concarnois osa même, au début du siècle, adresser un démenti au
Directeur de l’Observatoire de Paris qui avait affirmé peu de
temps auparavant que la lune n’avait « aucune influence sur
les phénomènes de notre atmosphère ». Le vieux marin avait
vu rouge et avait publié dans un grand journal le fruit de ses
observations personnelles.
- « Les
tempêtes, affirmait-il, arrivent rarement sans avoir été signalées
par quelques phénomènes précurseurs et ces phénomènes, savez-vous
où je les cherche ? Dans les positions de cette pauvre lune
si calomniée. Voici les principales remarques que mon expérience
m’a suggérées :
- Si
le matin, par un beau temps, j’aperçois à côté du soleil véritable,
la lumière équivoque de ce que j’appellerais « le faux soleil »,
j’y vois le signe d’une tempête prochaine qui commencera non pas
au coucher du soleil mais au coucher de la lune.
- Quand le
soleil, au matin, s’est entouré d’une auréole, une bourrasque
est inévitable : cette bourrasque, cette fois encore, commencera…
quand la lune se couchera.
- Vers le soir,
si j’aperçois à l’horizon du côté sud, de petits nuages noirs
allongés, semblables à de légers traits de crayon, j’ai la certitude
qu’au coucher de la lune nous auront à essuyer un « coup
de tabac ».
Par
temps clair, si je vois au ciel des nuages chevelus, des « barbes
de chat », j’en conclus que le vent soufflera de la partie
vers laquelle s’inclinent ces nuages.
- De petits
nuages pommelés apparaissent par temps clair, j’en conclus que
nous aurons de la pluie et du vent dans un ou deux jours, toujours
au coucher de la lune.
- Ces règles
simples et nettes ne sont pas le fruit d’un empirisme douteux.
Depuis cinquante ans je les vois se confirmer par l’expérience
de tous les jours. Monsieur Fave (Directeur de l’Observatoire)
rira peut-être de l’obstination routinière du vieux pilote, mais
je lui affirme que s’il vivait la vie des marins, il n’en rirait
pas… »
-
- Et le pêcheur
ajoutait : « La lune ne produit pas les mauvais temps,
elle les atténue au contraire tant qu’elle est sur l’horizon…
Voici un tableau de l’influence probable de ses phases :
- Nouvelle
lune : plus beau temps le soir que le matin.
- Pleine lune :Plus
beau temps la nuit que le jour.
- Dernier quartier :
plus beau temps le matin que le soir »
-
- Jamais il
n’y eut de réplique à ces constatations simples et fondées
sur un contact quotidien entre l’homme et la nature. Sans
doute ces Messieurs de l’Observatoire avaient-ils vérifié qu’effectivement
ce pêcheur concarnois en savait plus qu’eux dans ce domaine ?
…
- Et si
le pilote avait encore raison… cent ans plus tard ?
-
