Commandé par Jérôme Bonaparte, Le Vétéran, superbe vaisseau français de 74 canons fait partie de l'escadre du Contre-Amiral Willaumez qui a quitté Brest le 13 Décembre 1805 pour une campagne de 14 mois. Les ordres sont de perturber le commerce anglais en Atlantique Nord et Sud.
Après quelques mois de navigation, l'escadre se trouve au large des Bahamas, poursuivant un convoi britannique. Les consignes du Contre-amiral sont, en cas de dispersion de la flotte, de faire route sur le banc de la " Grande sole " au sud de l'Irlande.
Ce sera le cas du Vétéran qui arrivera sur zone le 23 août 1806. Aucun navire en vue, Jérôme Bonaparte décide de faire route immédiatement sur Lorient en passant au sud des Glénan. Les vents favorables lui ont permis de porter toute la toile et de filer bon train, malgré une carène couverte d'algues.
Le 26 août, quelques heures avant l'aube, le vent fraîchit du sud-ouest avec grains. Il faut rentrer les bonnettes, ariser les huniers et carguer misaines et grand voile. En fin de nuit, quatre navires sont aperçus qui seront reconnus comme ennemis.
Le Vétéran s'approche toujours des Glénan. Que faire ? Les écueils sont proches et la marée baisse ; faut-il saborder le navire ou " braver " l'Anglais ? Il faut remonter au vent, fuir, ou trouver un abri.
Le second capitaine Halgan, le second capitaîne gagne l'avant du navire pour veiller au virement cap pour cap. C'est alors qu'il entend un matelot-timonier du nom de Jean-Marie Furic qui, ayant pratiqué la pêche en baie de Concarneau, affirme qu'il peut y faire rentrer le Vétéran. Halgan le questionne sur son savoir et l'amène à la timonerie où Jérôme lui confie la barre.
Tout se passe bien sauf quelques peurs bleues de l'Etat-major au vu des écueils environnants et la tentative d'encerclement des Anglais. A 9H30, le Vétéran est au mouillage en baie de la Forêt.
Le lendemain, un pilote de Concarneau conduira le navire au plus près de l'entrée du port de Concarneau où il mouillera. En raison de son tirant d'eau important qu'il faut réduire à 19 pieds , toute l'artillerie est déposée à terre par les bateaux de pêche concarnois et la provision d'eau douce est débarquée.
Le 30 août, le Vétéran s'arrime au pied des fortifications de la Ville-Close , affourché sur deux ancres en patte d'oie, la proue cap au sud sud-ouest. L'honneur était sauf et l'Anglais devra se contenter de veiller au-delà des Glénan.
Trois longues années passeront ainsi, et, dans la Ville Close , aux sept cents habitants se mêleront un grand nombre de marins désoeuvrés. L'atmosphère du port a bien changé, dans l'ombre des ruelles, on parle de complots. Ailleurs des familles se forment.
Jérôme Bonaparte quitta son navire le 28 août 1806, remplacé par le capitaine de vaisseau Le Bozec, ennemi juré de l' "Anglais" d'alors. Il laissa son vaisseau au port, mais conserva une grande reconnaissance à Concarneau, pour l'issue heureuse de cette aventure qui aurait pu si mal tourner.