La Bigorne dans l'anse du Saint-Laurent.
"La Bigorne", un ancien thonier transformé en boîte de nuit dans les années 60 par Louis Le Mouëllic était un lieu mythique pour la jeunesse concarnoise. Celui que tous surnommaient "Loulou La Bigorne" a accueilli durant plus de vingt ans des générations de danseurs ou fêtards de la région, mais aussi des vedettes du show-biz comme Lucky Blondo, Johnny Hallyday ou Carlos...
Souvenirs : Lucky Blondo se rappelle de soirées légendaires chez Loulou La Bigorne..."Je suis venu a Concarneau voici des années et depuis la ville fait partie de ma vie - je reviens six mois par an, à plusieurs moments, notamment pour les Filets Bleus.
Loulou était de ces hommes qui vous marquent. Un physique impressionnant, une gueule, un grand charisme, le tout enveloppé dans une simplicité et une douceur naturelles.
C'était aussi un baroudeur, un vrai, il avait trainé son paquetage sur toutes les mers et tous les océans, connaissait les ports les plus glauques du monde ou il appelait certainement toutes les prostituées par leur prénom. Corsaire des temps modernes, il racontait des histoires qui auraient méritées qu'on fasse le roman de sa vie. Pas un pays où il ne se soit bourré la gueule et/ou castagné avec les marins locaux.
Bien des années plus tard, il était rangé des voitures. Il avait son bateau, la Bigorne avec lequel il emmenait des groupes à la pêche au requin, au "peau bleu".
Et surtout il avait à la sortie de Concarneau, sa boite, la Bigorne au bord de l'anse St Laurent. Tous les bretons qui fréquentaient les boites dans les années 80/90 connaissaient la Bigorne, petite boite dans un vieux bateau en bois, à sec, installé là sans autorisation. Impossible aujourd'hui ! Mais à l'époque, les autorités fermaient les yeux, on ne touchait pas à Loulou. Loulou était une légende !
Il consolida son "bateau-dancing" à l'aide de béton et de parpaings dans les années 70, histoire de sécuriser un site, accueillant des dizaines de personnes chaque nuit. Il a tenu l'établissement jusqu'en1984. Le navire resta ensuite agoniser dans l'anse jusqu'en avril 1997, date à laquelle il fût démoli à coups de pelleteuse.
L'anse du Saint-Laurent , qui jadis abritait la Bigorne,
une boîte de nuit installée dans un bateau échoué.
Le bateau a d’ailleurs disparu peu après le personnage, l’anse retournant à sa virginité ; écosystème dans lequel finalement la seule espèce animale interdite…c’est l’humaine. Pour le stationnement, le spectacle était à frissonner d’appréhension les soirs d’affluence ; c’est miracle que ne soient arrivés que des accrochages sans gravité.
La boîte de nuit "La Bigorne" - Un haut lieu des nuits concarnoises de la seconde moitié du vingtième siècle sur lequel les historiens et ethnologues gloseront d’abondance un jour, et à propos duquel une parenthèse s’impose. "La Bigorne" était un ancien thonier dont l’âge avait immobilisé la quille, telle l’arthrose, dans une chape de béton sur le flanc boisé d’une superbe petite ria proche de la ville : l’anse Saint Laurent. Ses flancs généreux et rondouillards s’étaient avérés propices à une reconversion en boîte de nuit. On s’y rendait tard par des routes dont la poésie n’avait d’égale que l’étroitesse ; ce qui ne favorisait ni le stationnement ni les retours après boire. C’était l’œuvre de la vie d’un personnage disparu mais inoubliable et localement inoublié.
A peu près analphabète, il avait su remplacer l’instruction par la ruse et les plaisirs de l’esprit par ceux de la chair et de la chère. Il brassa beaucoup d’argent et de plaisirs dans sa vie.
Le lieu, pourtant assez isolé et dissimulé, devint célèbre un jour de 1966, quant un article du quotidien local informa tout un chacun des infortunes de l’absence de vertu de Louis : Au cours d’une soirée que l’on dit théâtrale et aux tableaux multiples, une demoiselle, se trouvant à genoux dans une situation où elle ne pouvait pas parler, n’eut d’autre alternative pour manifester qu’elle n’était plus d’accord, que de mordre férocement l’appendice le plus précieux de notre Louis. Si férocement que l’affaire se termina à l’hôpital de Concarneau pour une couture dans l’urgence. Comment l’affaire vint-elle aux oreilles de la presse ? D’aucuns pensent que c’est Louis lui-même qui aurait informé le paparazzi…Toujours est-il que toute la ville en fit des gorges chaudes pendant des années.
Réparé, bientôt en parfait état de fonctionnement, Louis atteignit alors le sommet d’une gloire durable.
Dans l’anse Saint Laurent la marée automobile monta soudain très haut, le parking en bord de route, déjà dangereux en diable, devint vite impossible. La mairie dut aménager un terre-plein à quelque distance pour absorber l’excès de véhicules lié à la fréquentation de «La Bigorne». La mairie ?…plus exactement le maire ; avec lequel justement Louis avait réussi à être au mieux. Les fantasmes populaires affirmaient qu’il fournissait des filles toutes fraîches au vieux, bedonnant et rubicond amateur. Qui peut l’affirmer ? Toujours est-il que Louis se permettait plus que le quidam moyen. Pour l’existence même de son établissement tout d’abord.
Qui se souvient du « beau Serge », et de son antique 2 chevaux Citroën, Serge, un solide marin barbu qui, lorsqu’il ne convoyait pas des vieux chalutiers à bout de bord vendus à l’Afrique, consacrait ses dons à soutenir plusieurs bars de la côte. Il n’avait pas toujours l’élocution très claire. Entre autres anecdotes, on pouvait signaler à son propos qu’il était un descendant du Comte Félix Youssoupof, l’assassin le 30 décembre 1916 de Raspoutine, le moine diabolique dont la situation de favori auprès du tsar précipita la tragédie des Romanov. Après la révolution, ce héros de la Russie blanche vint en effet résider au château de sa famille, « Kériolet », qui domine la rivière du Moros à Concarneau. Par un clin d’œil de l’histoire, « Sergueï » était alors très brun, barbu et chevelu…comme Raspoutine.
Loulou La Bigorne - Un homme du pays, Louis Mouëllic dit Loulou la Bigorne est devenu depuis plusieurs années l'organisateur, numéro un de la pêche au gros : une sorte de safari de la mer qu'il pratiqua tout d'abord pour son plaisir mais qui constitua son activité principale à l'intention des amateurs de fortes sensations mariant la pêche et le sport. Massif, barbu et hirsute, le mégot coincé au bord des lèvres, le look du capitaine de "La Bigorne II" colle parfaitement au stéréotype plus vrai que nature, du coureur des mers. Loulou, le verbe direct et convaincant, vante volontiers les qualités de sa vedette amarrée au ponton C de Port La Forêt : 15 mètres sur 4, deux moteurs de 135 chevaux, elle est équipée en matière d'électronique du tout dernier must en vigueur. (Le compas récupéré par 40m de fond sur une épave, lui avait été offert par Michel Brunet.)
Loulou était le parrain de Marie Claire, une des deux filles de sa sœur Raymonde Le Mouëllic (toutes les trois décédées). Je remercie toutes les personnes qui m’ont fourni des textes sur un petit passage de la vie de cet homme formidable... Il s'appelait Loulou !
Si vous possédez d'autres épisodes de la vie de Loulou
(notamment sur ses voyages en afrique avec Robert Faucon, Robert Crétin ...)
kerdalle@free.fr