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« Fémina » 1905
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A
Concarneau : la Fête des Filets Bleus
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Des
coiffes de Concarneau, de Plougastel, de Pont-Aven, des corsages
brodés de Pont-l’abbé, des robes à gros plis et des tabliers de
soie, les sardinières ont fait un concours, sous les arbres devant
la mer, et elles ont choisi une reine.
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Pour
la première fois, dans cette année qui ne fut pas heureuse, les
sardinières de Concarneau ont donné une fête et choisi une reine.
Les peintres, qui prennent leurs quartiers dans ces pays, avaient
donné des esquisses et des tableaux dont on avait fait une tombola
au profit de ces pauvres gens.
Enfin, un concours de costumes
avait fait sortir des coffres d’antiques splendeurs qui, dans
des jours meilleurs, avaient paré la joie des aïeules et les matins
de noces.
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C’est
par un vrai dimanche de septembre breton, un dimanche doux et
gris, qu’a eu lieu à Concarneau la fête poétiquement appelée les
« Filets Bleus ». On avait élevé sur la place d’Armes
une estrade ornée de branches de chêne et de filets, vraie parure
de la Bretagne qu’enveloppe la mer. Les bombardes et les binious
annoncèrent l’arrivée du jury que présidait M. de Billette de
Villeroche, maire de Concarneau. Et le concours des costumes de
sardiniers et de sardinières commence : costumes anciens,
costumes modernes. Les voilà sur l’estrade, toutes éclatantes
de vêtements variés et bizarres, brillantes et naïves de jeunesse,
les yeux clairs et les dents blanches.
Anne-Marie Pauline Le
Baccon ayant été proclamée, on la vit descendre, parée d’un
costume vieux de deux siècles, dans un barque d’honneur fleurie
de bruyères roses, au milieu des coups de fusil, tandis que tout
le rivage chantait en
son honneur une très vielle chanson, inventée pour d’autres qui
sont mortes depuis longtemps. On célébra son avènement par des
danses, sous les arcades sonores du marché couvert. Par deux et
par quatre, les gars et les filles frappaient du talon. On reconnaissait
le pâtre et le marin, la fermière et la batelière ; les sardiniers
à leurs blouses brunes et à leurs bérets bruns, les gabiers à
leurs manches galonnées, les laitières à leurs allures plus sveltes,
les hommes de Daoulas à leurs bonnets de laine pourpres, les riverains
de l’Odet à leurs feutres poilus, les vieux mathurins à leurs
faces tannées et salées. Et au loin, dans le crépuscule, à travers
la pluie fine, on entendait tinter et descendre au rivage, la
voix mélancolique de l’Angélus du soir.
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Ce
jour là, les prix pour les costumes anciens ont été donnés à :
Mlle
Postic d’Elliant, à Mlle Le Corre de Quimper, à Mlle Capitaine
de Melgven,
à Mlle Gestin d’Elliant et à Mlle Ranou de Plougastel . . .
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