Le
Festival des Filets Bleus a toujours été passionné
par le costume dans sa diversité et dans sa signification. Mais
au fond, qu'est-ce qui ressemble le plus à un costume breton,
si ce n'est un autre costume breton ? Vu d'autres régions de
France, le costume breton c'est, pour les femmes, une coiffe, un tablier,
une robe ou une jupe et un châle. Pour les hommes un pantalon,
un chapeau, une veste, une chemise. Rien de bien exceptionnel à tout cela.
Mais
le costume breton parle, et dit des choses sur la situation
sociale, géographique voire matrimoniale de l'individu. Le costume
s'est développé après la Révolution française.
C'est à ce moment là qu'il est devenu le moyen d'exprimer
à la fois une individualité et l'appartenance à
un groupe. C'est une sorte de carte d'identité qui se portait
jusqu'avant la seconde guerre mondiale alors que le costume traditionnel
avait été abandonné partout en France. En y regardant
de plus près, on comprend mieux la Bretagne, y compris celle
d'aujourd'hui. Celle qui refuse le centralisme jacobin et cultive une
identité locale très forte.
" Kant bro, kant giz, kant parrey, kant illez "
Cent pays, cent modes, cent paroisses, cent églises
C'est ça le costume breton. D'un bourg à l'autre, d'un
village à l'autre les vêtements changent. Ainsi, on apprend
d'après le travail de dessin de Creston qu'en général
les vestes des hommes sont courtes au Sud de la Bretagne, tandis qu'elles
sont à la française au nord, sauf exception.
Les coiffes
des femmes d'Hillion, d'Yffignac et de Langueux sont apparentées,
mais attention, elles ne se portent pas de la même façon.
A Quimper, quand un homme devient père, il porte un gilet bleu
au lieu du violet traditionnel. Et même si depuis 1940 on ne porte
plus le costume de sa paroisse, pas question de tout confondre.
Les
vêtements continuent à parler, et pas uniquement aux folkloristes.
« C'est la révolution industrielle et le développement
des ateliers de confection qui a tué le costume très local
».
Creston en dessinant les costume entre 1942 et 1946 voulait faire un
inventaire du costume breton, pour éviter qu'il ne tombe dans
l'oubli et pour moderniser la tradition.
Un costume breton c'est plus qu'un vêtement,
c'est une sorte de carte d'identité grandeur nature
Le costume breton comme mode de communication
On
s’émerveille sans peine sur l’ornementation
d’un costume breton. On n’apprécie pas toujours à
sa juste valeur le message que son propriétaire souhaitait faire
passer. Claudine, la responsable de l'exposition des
Filets Bleus vous donnera quelques-unes des clefs nécessaires
pour décoder le vêtement traditionnel. Il faut tout d’abord
voir dans le costume breton l’expression de l’appartenance
à une des classes de la société. En l’occurrence,
le costume traditionnel est celui du monde rural, une communauté
indépendante qui a peu de rapport avec le fonctionnement de la
Nation, sauf à travers les notables.
66
modes différentes avec des variantes :
Pour autant, le vêtement est loin d’être uniforme
à l’intérieur de la classe populaire. Il est même
très diversifié. René Creston, dans les années
cinquante, recense 66 modes différentes, avec des variantes.
L’origine du costume traditionnel breton tel qu’on l’entend
aujourd’hui serait antérieure à la Révolution,
bien que l’on ait actuellement peu de documents sur cette période.
Au-delà de la coupe et de la couleur, la broderie permet une
différenciation. C’était un élément
supplémentaire pour démontrer son appartenance à
une communauté géographique.
Pays
et personnalité :
On portait le costume d’apparat dans les foires et les pardons.
On se donnait à voir aux autres. Je porte tel costume je suis
donc Bigouden, Glazik... Et même à l’intérieur
de chaque communauté, l’individu tenait aussi à
se démarquer. On se distingue par les matériaux et par
les motifs. L’uniforme n’est pas figé. Tissu rouge
dans le pays bigouden pour marquer que l’on est marié,
riche broderie pour exprimer son rang social, variante sur un thème
classique ou symbole religieux étaient autant de signes que l’on
envoyait à son entourage.