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1905 :
L’ANNÉE NOIRE DES FILETS BLEUS
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C’est
d’une période de misère comme en avait rarement connue notre coin
de baie qu’est née la Fête des Filets Bleus. Nous en connaissons
les réjouissances : elles ont pour origine ce qui fut une
tragédie.
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La
capricieuse sardine avait fui nos côtes. C’était un temps où les
chaloupes et les petits cotres (600 à 800 de ces bateaux fréquentaient
le port, à l’époque), revenaient désespérément vides après des
marées qui s’obstinaient à ne plus rien vouloir donner aux hommes.
Une à une, les conserveries (il en existait une trentaine) fermaient
leurs portes, et des familles entières quittaient le pays pour
un ailleurs qu’elles espéraient meilleurs.
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Cependant,
les touristes continuaient de venir passer la belle saison à Concarneau,
attirés par les bains de mer, entre deux visites aux vieilles
pierres de la Ville Close, et à ces artistes parisiens ou américains
dont l’œuvre fait
désormais partie de notre patrimoine. Une œuvre qui parle de la
douceur de vivre en notre pays, dont la délicate lumière éclaire
la peine des hommes qui y travaillent dur, d’autant plus dur qu’en
cette année 1905, la famine menace la ville. Peine perdue pour
ces concarnois dont les Filets Bleus, jadis rebondis et étincelants
de jolies sardines, remontent désormais vides à bord.
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Face à une situation qui semble sans issue, le Maire Samuel Billette de Ville-Roche, un des usiniers de la ville, décide un groupe d’amis à organiser une fête de bienfaisance au bénéfice des familles de marins-pêcheurs nécessiteuses (rappelons qu’il n’existait à l’époque ni assurance, ni aides officielle à attendre). Un comité est créé, composé de peintre, de poètes, de notables, qui mettent sur pied « La Fête des Filets Bleus », manifestation qui réunira notamment les commerçants et la bourgeoisie touristique, tous ceux enfin, qui ont décidé d’œuvrer pour un mieux-être des familles des marins concarnois. L’urgence dictait le vieil adage : « Il faut prendre l’argent où il est »…
La première Fête des Filets Bleus sera ainsi donnée le 10 septembre 1905. Tout Concarneau, ce jour-là, est présent sur la place où est dressé un chapiteau, parmi les sonnailles de binious et les roulement de tambours. La suite des festivités sera d’un caractère moins « folklorique » : il y aura les prestations de la fanfare municipale, un trio montmartrois, un récital de poésie, des airs à la mode d’alors…
Mais
les fonds recueillis viendront efficacement alimenter la caisse
de soutient des familles des marins-pêcheurs. Au départ, il n’était
pas prévu de renouveler cette manifestation tous ans. Mais la
crise de la pêche persistant, une nouvelle Fête des Filets Bleus
fut organisée en 1906. soit dit au passage, une deuxième édition
qui s’est déroulée dans un climat assez tendu, notamment marquée
par un attentat à la dynamite en gare de Concarneau et une grève
des terrassiers de
la future ligne de Pont-Aven. Plein succès de cette fête quand
même, puisque la caisse de l’œuvre des Filets Bleus enregistrera
le joli bénéfice de 8 400 Francs.
La
Fête des Filets Bleus, devenant une institution, sera
désormais donnée tous les ans, à dates variables, mais définitivement
fixée depuis 1912, à l’avant-dernier dimanche d’août. Après l’interruption
de la Grande Guerre, elle renaîtra en 192, déménageant du même
coup de la Place d’Armes au Petit-Château : on y verra apparaître
les premiers chars, les premiers concours de costumes, une exposition
d’objets fabriquées par des marins (maquettes de bateaux, gravures
sur os, etc.).
Cette
manifestation, dont il convient de rappeler qu’elle est la plus
ancienne des fêtes de bienfaisance à caractère folklorique de
Bretagne, n’a plus pour but de venir en aide aux familles
de pêcheurs. Mais elle est plus que jamais, une occasion de faire
connaître aux estivants les costumes, les danses, les musiques,
les produits locaux, les vieux métiers, les jeux, en deux mots,
tout ce qui fait notre tradition. Celle d’un pays, d’une ville
que nous voulons faire aimer. C’est le but que c’est fixé le comité
organisateur, avec l’appui efficace de la municipalité.
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Mais que ces journées et ces soirées de chatoyantes réjouissances
Ne nous fassent pas oublier
Que cette liesse est née dans les larmes...
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