Vacances, plaisance… et Filets Bleus 2005 !

 

Bonjour, plaisancier d'août, te voici arrivé pour la première fois, par la mer, à Concarneau : Concarneau ville bleue, bleu comme un ciel d'été, bleu comme le dos des sardines se déplaçant par bancs dans la baie, que l'usine Gonidec emboîte au bleu, bien sûr.

Arrivant par mer, il a fallu que tu potasses la carte des Glénan et de la baie de Concarneau pour en trouver le chemin d'accès marqué par l'alignement du feu du clocher de Beuzec par celui de la Croix , plus visible de nuit que de jour. Pourquoi un tel feu dans un clocher me diras- tu ! Il existe toujours un véritable phare à Beuzec sur le même alignement, mais il ne sert plus depuis 1964, car, situé pourtant assez haut, il s'est caché derrière un rideau de bâtiments. Impossible de le voir ! Il a fallu monter une lanterne dans le clocher de la paroisse. Que la lumière soit !

En approchant du port, sur tribord, tu as observé la balise du cochon, toute de vert vêtue et parfois saluée au petit matin par certains pêcheurs, d'une lampée de vin rouge pour obtenir une belle pêche. Saluer un cochon pour avoir un poisson ! Il faut vraiment le faire. Sur bâbord, la bouée du Lué-Vras, en habit rouge de cardinal, oscille lentement au gré des vagues, les « cailloux » ne sont pas loin. Tu arrives à Men-Fall, après avoir remarqué «  la Basse du chenal », que certains nomment « le grand domestique ». J'en ignore l'origine mais Concarnoises et Concarnois sont friands de ces mots bien ciblés. Tu n'as plus qu'à mettre le cap sur la fenêtre d'un pignon blanc où le feu de Lanriec scintille en vert. Virage sur bâbord et avant d'entrer au port, la Médée , balise latérale rouge, gardienne vigilante, t'inspecte et te laisse passer. Ton poste est prévu au ponton « C ». Te voilà à Concarneau.

Déjà, un air de cornemuse, de bombarde te chatouille l'oreille, c'est le bagad de Concarneau qui anime les quais, entouré d'une kyrielle de touristes qui applaudissent. J'aime cette musique, ami, elle est l'âme de notre Bretagne d'orgueil, de vent et de mer, mais toujours très accueillante. Cette musique n'est que le prélude de la grande fête du pays, le Festival des Filets Bleus, qui, cette année 2005 commémore le 100 ème anniversaire de sa création.

Peut-être as-tu lu qu'au début du 20 ème siècle, 1901/1905, plus de 500 chaloupes sardinières du port restaient la plupart du temps au mouillage ou à quai, en raison de la rareté de ces sardines qui, à cette époque, préféraient visiter les côtes du pays basque. Plus aucune sardine, pas d'argent pour le ménage, plus de godaille, rien. Si ! La misère hideuse qui rôde partout sur les quais, le long du fort  Pleurou  et dans les petites rues du quartier des pêcheurs. Misère du fait d'une monopêche, situation accablante pour des gens fiers qui ne veulent pas mendier. Alors, un jour, le bon sens a prévalu, et  municipalité, peintres, usiniers, armateurs et autres personnalités, s'unissent pour créer une fête charitable et sociale dont le bénéfice sera réparti entre tous ces malheureux. La première fête des Filets Bleus naissait, une reine était élue, choisie parmi les ouvrières des usines concarnoises.

Plus tard, nos clupéïdés au dos bleu, convaincus que la baie de Concarneau leur convient mieux que celles du sud, y reviennent en bancs serrés, sentant déjà la rogue tombant par poignées le long des filets bleus aux aguets. La pêche, enfin, reprend pour le bonheur de tous et l'on voit de nouveau au Quai Nul, s'empiler sur des charrettes à bras, des caisses de précieuses sardines qui arrivent rapidement aux usines proches où l'œil vigilant des contremaîtresses en vérifie la fraîcheur.

Tu en goûteras des poissons cette semaine, car demain, 15 août, 1 er jour du festival, Poissonnade : sardines et thons grillés de main de maître. Quel bonheur ! Et ces chants de marins qui te captivent, te chavirent, allez, chantons avec eux. Puis, puis dans la semaine, il te faudra bon pied et bon œil pour apprécier cette culture celtique, ces nuits magiques, nourries de musiques qui t'entraînent dans des An-dro, Hanter-dro, Gavotte Pourlet, Kas ha Barh, une foule de danseurs ondulant ensemble. C'est beau et prenant, tu sais. Chaque jour aura son thème, « Nuit bleue », « Nuit bretonne »... Tu pourras également apprécier l'exposition des œuvres des 44 Artistes - Peintres des Filets Bleus qui ont créé des tableaux, et qui les ont gracieusement offerts au Comité, par analogie à la première fête de 1905. Sans doute seras-tu intéressé par l'animation du port avec visite des différentes infra- structures, et démonstration de matelotage pour t'amariner. Nous retrouverons le Quai Nul  tout excité de la bonne pêche du jour. Un retour à la vie des marins d'antan !

Une semaine festive imprégnée de culture traditionnelle irlandaise, galicienne, asturienne, québécoise et bretonne, avec un moment fort le dimanche, le défilé du Festival des Filets Bleus, avec ses bagadoù et cercles celtiques. En soirée, en apothéose tu applaudiras un impressionnant feu d'artifice digne d'une fête centenaire.

Et vive notre reine des Filets Bleus 2005…
  
Claude NEDELEC